Cette année marque le 25ème anniversaire de l'éclatement de la bulle technologique, un événement qui résonne particulièrement après la récente chute du Nasdaq. À l'époque, la montée fulgurante des valeurs technologiques était alimentée par l'exubérance autour de la commercialisation d'Internet, propulsant l'indice à une multiplication par cinq entre 1995 et 2000, avec des entreprises atteignant des valorisations jusqu'à 200 fois leurs bénéfices. Aujourd'hui, les parallèles avec notre situation actuelle sont frappants.
Les bulles spéculatives sont souvent le résultat d'innovations majeures. Actuellement, l'enthousiasme autour de l'intelligence artificielle et la flambée boursière des "Magnificent 7" rappellent cette dynamique. Cependant, des différences essentielles existent. Contrairement aux centaines de startups « .com » des années 90, aujourd'hui, seuls quelques géants de la tech dominent le marché, ayant su s'approprier l'IA avec des bilans solides, une capacité d'investissement considérable, une forte liquidité et des bénéfices tangibles. Certes, les valorisations des Magnificent 7 incluent une prime, mais cela s’explique en grande partie par des attentes de bénéfices sans cesse revues à la hausse. Les prévisions de croissance pour ces entreprises restent nettement supérieures à celles du marché, offrant une perspective plutôt optimiste.
Malgré tout, de nouveaux risques émergent. La concurrence accrue de Deepseek, annoncée en janvier dernier, ainsi que le modèle low-cost chinois, a remis en question non pas la technologie elle-même, mais les investissements prévus dans les infrastructures des centres de données. Les barrières à l'entrée s’effondrent, rendant injustifiable une prime de valorisation aussi élevée. Le sentiment général des investisseurs est donc affecté.
Que l'on qualifie la situation de bulle ou non, une chose est certaine : nous franchissons un nouveau cycle technologique. Historiquement, à chaque cycle, les entreprises leaders finissent souvent par sous-performer à mesure que le paysage concurrentiel évolue. Les signes d'un changement de paradigme se dessinent, alimentés par des nouvelles incrémentales devenant négatives.
En résumé, bien que des similitudes avec le passé soient visibles, la situation actuelle est ancrée dans des réalités économiques plus robustes. L'innovation continue de façonner l'avenir, mais une vigilance accrue est de mise face aux évolutions concurrentielles et aux changements de paradigme qui se profilent à l'horizon.
Juliette JOURNO - Gérant du fonds Palatine Planète